Ceux qui peuvent surfer ensemble peuvent vivre ensemble

23 janvier 2015

Ceux qui peuvent surfer ensemble peuvent vivre ensemble

En 2007 Dorian «  Doc », Paskowitz, décédé en novembre dernier à l’âge de 93 ans, apprend que les quelques surfeurs de la bande de Gaza doivent se partager la seule planche disponible. Avec Arthur, un surfeur israélien  et d’autres membres de l’organisation, il réussit à acheminer 14 planches à Gaza. Interrogé par les médias Doc aura cette phrase «  Etre capable d’aller vois ses ennemis et leur donner quelque chose qui les rend heureux est la plus incroyable des aventures »

 

Doc et Arthur pendant un concert en 2007
Doc et Arthur pendant un concert en 2007

Surfing 4 peace existe depuis 2004 à l’initiative de Dorian »Doc »Paskowitz » et Arthur Rashkovan. Dorian est une vraie légende du surf californien. Anciennement médecin il a décidé de tout plaquer pour vivre dans un van avec sa femme et ses 9 enfants selon les principes du surf et de la religion juive. Il a introduit le surf en Israël dans les années 50 lors d’un de ses voyages.

A Tel- Aviv, je rencontre Arthur qui tien une boutique de surf dans le nord de la ville. Il me raconte cette histoire qui a permis de mettre en place les bases du mouvement.

Surfing 4 peace n’est pas une ONG, ni une association, simplement une communauté de surfeurs. Arthur n’a pas voulu lui donner d’existence juridique pour rester en dehors de tout débat politique et partisan. Arthur ne voulait pas inscrire Surfing 4 Peace sur un territoire, ne pas se retrouver à choisir entre Israël et Palestine. Il reste ainsi dans la contre-culture chère au surf. Surfing 4 peace au Moyen-Orient peut compter sur des donateurs américains pour pouvoir vivre. Elle organise des concerts et aussi des ateliers pour les surfeurs arabes israéliens de Jaffa.

Complètement dans le monde de la glisse, sa lucidité me frappe. Arthur sait que ce genre d’initiative ne change pas le monde et n’apporte pas de solution politique, c’est juste une pierre pour essayer de mieux vivre ensemble. En Europe, deux personnes ont été conquises par le projet.

Benjamin et Samuel sont français. Ils ont décidé tous les deux de créer la section européenne de Surfing 4 peace. Par Skype, Samuel affirme que la création de la section européenne est née de la volonté d’agrandir l’initiative originelle d’Arthur et Doc au pourtour méditerranéen et plus seulement au Proche-Orient.

Quelques semaines plus tard je joins par Skype, Samuel  dirige l’association Surfer pour la paix, la section européenne de Surfing 4 peace.

Surfer pour la paix travaille sur une dynamique évènementielle consistant à réunir des sportifs autour d’une compétition de surf à Biarritz afin de célébrer la proximité de toutes les cultures méditerranéennes. L’autre volet de l’organisation tourne autour d’un programme d’échange entre clubs de surf de la Méditerranée. « Un Erasmus pour les profs de surf », me dit-il. Le but de ces actions est de créer des bulles de résistance.

« C’est une façon de mettre en lumière une volonté d’une partie de la société civile, une ouverture à l’autre, aux voisins alors que ce n’est pas du tout l’image donnée dans les médias de ces pays. 

En septembre dernier, Surfer pour la paix a organisé un premier évènement avec 22 jeunes de pays méditerranéens. L’accueil des jeunes s’est d’abord fait à Marseille avec un sommet autour de la paix. Puis le groupe a pris la direction de Biarritz pour la Med Cup for Peace.«  chaque minute de la semaine était magique »,  Samuel raconte…

« L’évènement a commencé un samedi. On avait dans le groupe deux jeunes Israéliens de 16-17 ans et un Palestinien de 17 ans, et on les a retrouvés tous les 3 à une heure et demie du mat au skate parc de Marseille. Ça ne faisait pas une heure qu’ils se connaissaient et ils partageaient une session de skate. Ils ne se sont pas lâchés de la semaine.

Grande a été ma surprise face à ces liens qui se sont créés.

Le lundi nous sommes arrivés à Biarritz et nous sommes allés surfer tous ensemble…et après nous sommes rentrés à l’hôtel.  Tout le monde était agglutiné dans une chambre avec trois guitares, une pédale, ils avaient écrit des paroles, ils se sont mis à slammer. En une heure ils ont fait une chanson qu’ils ont enregistrée. 

C’est que des petites pépites comme ça. On a eu beaucoup de moments de connivence entre jeunes qui viennent de peuples dont on n’ a pas du tout idée qu’ils peuvent être potes. »

credit @Nadia Ghali
credit @Nadia Ghali

 

 

 

 

 

 

Samuel a permis à trois jeunes de la région parisienne de venir à l’événement et de prendre part au groupe. Il s’est rapproché de Reporter citoyen, une formation au journalisme pour des jeunes de « quartier ». Assa, une femme de 21 ans fait partie de ces jeunes.

Assa est originaire de la région parisienne. Dynamique et pleine de sagesse, elle raconte son expérience dans ce groupe :

« Franchement, c’était juste génial. Une expérience hors du commun… tu rencontres des gens de toute la Méditerranée, en plus des personnes qui sont censées se détester : des Israéliens, des Libanais, un Palestinien, Italien, Marocain, Algérien. Tu te dis finalement ce qu’on dit, toutes ces haines qui sont censées être… en fait il y a d’autres gens qui pensent différemment. J’ai essayé de parler avec différentes personnes. J’ai parlé avec le Palestinien.. J’avais vraiment envie qu’il me dise ce qu’il pensait par rapport à la situation de l’été dernier. Il m’a dit la guerre c’était son quotidien. Il ne voyait pas de différence avec la paix. il me disait  détester les gens qui prennent parti, et que ce sont, eux, les civils de tous bords qui trinquaient. Il ne lui venait pas à l’esprit de penser,  » je hais tous les Israéliens ».  Et tu vois, j’ai été étonnée par ces paroles de paix de quelqu’un qui vit les choses en direct ».

Samuel ne nie pas l’aspect politique de ce genre de rencontres où sont réunis des jeunes de peuples censés se détester. A la fin de l’événement, le 28 septembre dernier.  Il confie qu’il y a eu des soucis avec quelques gouvernements qui ont appelé certains de leurs ressortissants une fois que les médias de leur pays ont eu connaissance de ce genre d’initiative. «  Ces jeunes ont été appelés sur leur portable et ils ont été lynchés médiatiquement un peu en forme de coup de pression, d’intimidation pour dissuader tous les autres qui souhaitaient participer à  la même chose. »

Surfer pour la paix veut aussi emmener les jeunes de ces pays en dehors de la Méditerranée pour d’autres pays et cela n’est pas anodin comme démarche : deux jeunes qui vivent dans des pays voisins et qui voyagent ensemble à l’étranger se rapprochent. Il se mettent à l’eau ensemble et lorsqu’ils sont sur une planche : la mer ne fait pas de différence.

“People who surf together, can live together.” Doc

Surfer pour la paix organise entre le 4 et le 11 avril prochain un voyage d’échanges culturels entre des jeunes Israéliens et Palestiniens aux côtés de jeunes d’Amérique latine. La prochaine Med Cup for peace aura lieu du 10 au 17 octobre. Toutes les candidatures sont les bienvenues, mais les places seront limitées ! si vous êtes surfeurs et que vous souhaitez participer ou connaissez des personnes souhaitant participer contacter l’association : samuel@surferpourlapaix.org.

Facebook :

https://www.facebook.com/Surfing4Peace

Plus d’informations sur la Med Cup for Peace : https://www.medcup4peace.org/

 

 

 

Alice Martins Gaza 2010
Alice Martins Gaza 2010
credit @Nadia Ghali
credit @Nadia Ghali
credit @Nadia Ghali
credit @Nadia Ghali
 @Nadia Ghali
@Nadia Ghali
  @Nadia Ghali
@Nadia Ghali

atelier de surf avec les jeunes arabes israéliens de Jaffa.

@Sardine Surf Club
@Sardine Surf Club
Alice MArtins-Gaza 2010
Alice Martins-Gaza 2010

 

 

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